Hervé BLAJMAN, docteur en Pharmacie, a 30 ans d’expérience en officine. Après un parcours relativement classique, il décide de se former en homéopathie. Discipline qu’il enseigne maintenant à des étudiants de 5ème année à l’Université de Pharmacie de Nancy et au CDFH (Centre de Formation en Homéopathie). Il possède encore bien d’autres cordes à son arc...
L’homéopathie a une place importante dans votre pratique. Pourquoi ?
Je considère que je dois beaucoup à l’homéopathie car c’est une discipline qui m’a amené à l’enseignement.
Je pratiquais l’homéopathie en officine depuis déjà quelques temps et il y a une dizaine d’années, le Centre de Formation en Homéopathie m’a proposé de partager mon expérience auprès des pharmaciens et préparateurs.
Je les rencontre régulièrement pour leur permettre de se spécialiser dans ce domaine et apporter des solutions supplémentaires à leur clientèle. Cela m’a permis par la suite d’enseigner en cinquième année à l’Université de pharmacie de Nancy. Je me suis rendu compte que j’adorais transmettre, c’est un véritable bonheur !
Quelles autres disciplines ont attiré votre attention ? Et quelle place ont-elles dans votre officine ?
Je suis passionné d’apithérapie, c’est-à-dire les soins par les produits de la ruche. J’ai rencontré plusieurs personnes qui pratiquent l’apithérapie.
Je suis d’ailleurs allé me former à l’AFA (Association Francophone d’Apithérapie) sur Lyon suite à une rencontre avec un apiculteur, qui travaille dans le respect des abeilles, de façon bio, sans aucun traitement.
Je trouve très important de proposer LE bon produit en officine.
Si je ne suis pas certain de la qualité du produit, mon conseil ne sera pas forcément efficace.
Pour aller jusqu’au bout de cette réflexion, je me suis engagé à faire mon propre miel. J’ai des ruchers du côté de Tours, près du château de Chenonceau. Dès le printemps, je récolte environ 150 kg de miel que je vends dans mon officine. Je propose également de la gelée royale et de la propolis fraîches. Je fais analyser mon miel pour connaître sa concentration, son taux d’humidité et vérifier qu’il est parfaitement propre à la consommation.
Avoir un bon produit et de grande qualité a toujours été une priorité pour moi.
J’ai une façon un peu particulière d’exercer dans mon officine. Je propose des rendez-vous “nature”.
Ce ne sont pas des consultations bien-sûr mais je fais du conseil. Je reçois des clients pendant une demi-heure, voir une heure.
Je fais de l’accompagnement en oncologie, m’occupe des problèmes inflammatoires, du stress, avec la plupart du temps des problèmes psychologiques inévitables. Je cherche des informations utiles dans chaque domaine que je connais, le meilleur de chaque discipline.
J’ai toujours voulu comprendre les symptômes que les patients expriment.
En plus des traitements allopathiques, vous proposez donc régulièrement à vos clients une médecine alternative pour les accompagner ?
Je n’aime pas ce terme de médecine “alternative” qui signifie que l’on est “en dehors”. Moi je préfère parler de médecines intégratives car pour moi elles s’intègrent avec le reste des traitements proposés.
Par exemple à l’officine, j’ai de nombreux médicaments qui agissent contre les maux de ventre. Pourtant si je ne donne que ces médicaments, le patient sera soulagé mais reviendra à nouveau plus tard pour ces mêmes maux de ventre.
Il est important de comprendre pourquoi il présente ce symptôme.
Il y a toujours une connexion entre les deux cerveaux (dans la tête et dans nos intestins) et je prends du recul pour essayer de comprendre la personne.
Lorsque l’on accorde du temps aux patients ils vous en sont reconnaissants. Si on veut comprendre quelqu’un, il faut prendre du temps avec lui.
J’ai la chance de pouvoir prendre mon temps car j’ai une équipe à mes côtés et grâce à eux, cela me permet de libérer du temps pour mieux conseiller les patients.
Avec mes collaborateurs, lorsqu’un patient nous dit qu’il a un rhume, avant de proposer un médicament, il faut s’interroger. Est-ce que le patient a le nez qui coule ou non, depuis combien de temps ? Il faut prendre le temps de s’intéresser à la maladie de quelqu’un. S’il vous dit qu’il a le rhume depuis 3 mois alors peut-être qu’il est allergique.
C’est ce que j’aime dans mon métier : cette relation à l’humain qui est au centre de tout. Je considère qu’il n’y a rien de plus beau quand quelqu’un dit merci, ça va mieux !
Nous avons la chance que nos patients entrent dans une officine sans qu’on leur demande quoi que ce soit. En contrepartie, il faut être en mesure de leur proposer un maximum de solutions. Il ne faut pas être trop restrictif.
Tous les symptômes sont des signaux que l’organisme donne et il faut y être attentif. En allopathie, une fièvre par exemple, on la combat au lieu de l’accompagner. C’est un signal d’alerte. Donner un Doliprane ou un Advil pour la faire tomber ne règle rien. Pourquoi a-t-on de la fièvre ?
Il y a forcément une raison.
Je ne suis pas anti-médicament, il ne faut pas oublier qu’on en a besoin.
Mais il faut tout de même limiter la durée de la prise et si on peut compléter avec quelque chose qui permet de limiter la prise, c’est l’idéal !
En tant que pharmacien, on sait qu’avec un médicament, il y aura des effets secondaires pour lesquels, parfois, on prescrit d’autres médicaments.
Dans une officine, c’est notre rôle de suivre les clients qu’on appelle “polymédicamentés” et limiter la prise de certains médicaments en proposant par exemple de l’homéopathie, de la phytothérapie ou peut-être de la MTC.
De nos jours, on est formé à travailler en réseau avec des partenaires. On ne met plus le médecin d’un côté et le pharmacien de l’autre. On met en relation les thérapeutes pour le bien-être du patient et un meilleur accompagnement.
Que le patient aille chez un magnétiseur, un chiropracteur ou un sophrologue, je lui demande toujours si cela lui fait du bien. Si c’est le cas, alors qu’il continue. Par contre si l’un d’entre eux conseille d’arrêter l’allopathie, alors attention, c’est du charlatanisme.
Donc finalement, on apprend à se mettre en réseau, à avoir des partenaires de confiance parce qu’en fin de compte le plus important reste le bien-être du patient. Malheureusement, trop de médecins pensent encore qu’il n’y a que l’allopathie. C’est dommage car c’est très réducteur.
L’allopathie ne règle pas tout.
Effectivement certains professionnels de santé n’approuvent pas l’usage de médecines « intégratives ».
Quels sont les risques ?
En se montrant réfractaire aux médecines intégratives, le patient n’osera pas forcément dire à son praticien ce qu’il prend alors qu’en les mettant à l’aise ils se confieront plus facilement.
En tant que pharmacien, je mets mes connaissances des plantes au service des patients. Je peux ainsi les avertir lorsque certaines plantes ne sont pas compatibles avec leur traitement en chimiothérapie ou radiothérapie par exemple.
Et souvent malheureusement, lorsque les médecins ne sont pas ouverts, le patient ne va pas oser. Proposer et accepter les médecines intégratives, ce n’est pas faire obstacle à l’allopathie.
Tout est une question de formation. Tout ce que je fais, je ne l’ai pas inventé et je le valide auprès de référents.
Comment en êtes-vous venu à la Médecine Traditionnelle Chinoise ?
En 2020, j’ai fait une très belle rencontre avec Yulin JIANG. La Médecine Traditionnelle Chinoise m’a tout de suite intéressé car elle est similaire à l’homéopathie, dans le sens où elle prend le patient dans sa globalité.
JZ utilise des formules ancestrales qui ont pu être vérifiées par des siècles d’utilisation et de pratique avec une maîtrise et un contrôle global de la production.
C’est très important pour moi car il ne suffit pas d’avoir de bonnes formules, il faut également que les plantes soient de qualité et efficaces !
Grace à ces formules, il nous a été possible de proposer des produits de références à l’officine. Les patients sont satisfaits et je pense qu’on va faire un bout de chemin ensemble.
Il y a peu de pharmaciens qui proposent ces produits mais je pense que c’est vraiment un beau projet.
Ce genre de rencontre, c’est ce qui me donne envie de continuer à exercer.